27 oct. 2009

Ils ont marqué la chanson française (13) - Saki

Alors que la nouvelle chanson de Nolwenn Leroy est sympathique mais sans plus, rien de tel que de se tourner vers les tubes, les vrais, ceux des années 1980. C'est un peu l'objet de l'émission de ce soir, en hommage aux 25 ans du Top 50. Parce que le Top 50 a été créé en 1984, il y a donc toupil 25 ans.

Oui mais voilà. La chanteuse ici présentée n'est pas vraiment une figure emblématique du Top 50. Elle n'y a figuré qu'une ou deux fois, la nulle. Et en plus, dans ses abysses. Il y a donc assez peu de chances d'apercevoir Marc Toesca lancer Saki et son pourtant merveilleux Attends, Attends, ce soir sur France 2. Peter, Sloane, François Feldman, Début de soirée, oui. Saki, non.

En 1987, Saki, poussée par sa maman assoiffée de gloire infinie pour sa fille de douze ans à peine, sort un disque au titre plein de retenue, Attends, Attends. Parce qu'à l'époque, avant de fréquenter la grande Karen Chéryl, sur le déclin, dans une sitcom de TF1, Saki était une frèle adolescente prude. Mais à l'époque aussi, Saki s'acoquine avec un belâtre en pleine mue d'au moins six mois son aîné. Attention, quand j'écris s'acoquine, l'action est bien en-deça de la juste définition de l'adjectif coquin. Seulement des bisous, des regards chafouins et pis c'est tout. Sa deuxième chanson, qui ne recevra pas le succès escompté non plus, Allo baby, est vaguement un peu plus mature, mais du coup beaucoup moins intéressante. Attends, Attends se situe à la charnière de l'intellectuel et du charnel. Car là est tout le sel de cette chanson d'adolescence... Faut-il, faut-il pas ?... Nolwenn Leroy n'a finalement rien inventé.

Saki aurait pu être Elsa, Vanessa ou Priscilla, mais elle n'a pas eu la chance d'avoir un prénom qui se termine en a (et finalement heureusement, parce que Saka, c'est moche). Du coup, elle n'a pas eu le succès que méritait la formidable chanson Attends, Attends. Je t'invite, cher lecteur, chère lectrice, à l'écouter avec du plaisir.

[Précédemment dans Ils ont marqué la chanson française : François Feldman, Ophélie Winter, Claude Nougaro, Bill Baxter, Nicole Croisille, Vincent Delerm, Alliage, Les Minikeums, Alice Dona, Gérard Palaprat, Arielle Dombasle, Céline Dion]

24 oct. 2009

Au fait, tu savais que j'étais mort ?

J’aurais pu mourir le 25 août dernier. Il semble que je n’ai absolument rien écrit sur Le Post depuis cette chronique-là. J’aurais pu me noyer dans le Rhône le temps d’une baignade interdite ou sauter par la fenêtre dans un excès de folie téléphonique. Or, rien ne changeant sur la page d’accueil, le quidam infidèle que tu es, lecteur, lectrice, n’aurait jamais pu imaginer ma mort. Tu aurais pu écrire un commentaire humiliant mes écrits, moquant mes points de vue, critiquant mon esprit, croyant faire de l’humour, ne sachant pas mon éventuelle nouvelle situation six pieds sous terre.

Lorsque Michael Jackson meurt, son nom est sur toutes les lèvres. Avant même l’annonce officielle de sa mort, les plus sérieuses chaînes d’information sont aux aguets d’une éventuelle confirmation. Le quelconque petit lutin réveillé par son radio-réveil le 25 juin 2009 connaît dès potron-minet le tragique destin de la plus grande star du monde. Il est mort. Les répétitions de son concert-retour-événement-qui-n’aura-jamais-lieu sont portées à l’écran. Le chanteur-danseur sera omniprésent sur la scène médiatique durant de nombreux mois. Impossible de passer à côté de sa disparition.

Deux poids deux mesures.

Lorsque Filip Nikolic des 2 Be 3 meurt, point d’édition spéciale sur les chaînes d’information. Internet relaie la nouvelle. Sa disparition fera l’objet de 20 secondes en fin du journal de 20 heures de TF1 et de France 2 et une petite brève dans les quotidiens du 17 septembre 2009. L’indifférence des médias poussera le vice jusqu’à écorcher son « Nikolitch » en vulgaire « Nikolique », quand ce ne seront pas des plaisanteries déplacées sur le supposé manque de prestige de sa carrière. On peut aisément faire le même raisonnement intellectuel à propos de la mort d’un Patrick Swayze, voire, et c’est dans une mesure encore plus cruelle, d’un René Morizur des Musclés. Il n’empêche que dans le cœur d’un garçon de mon âge, Filip Nikolic tient – au moins – la même place que Michael Jackson. Parce que les 2 Be 3 font partie de mon Top 5 des artistes de référence qui m’ont accompagné dans la vie.

Trois poids trois mesures.

Et puis il y a les autres. Les autres gens qui meurent dans l’indifférence générale. Parlons de moi, une fois n’est pas coutume. Je pense régulièrement à ce jour où je mourrai. Peut-être arrivera-t-il plus vite que prévu. Et dans ce cas-là, qui pourra t’indiquer, lecteur, lectrice, que je suis parti ? Personne. Tu attendras une nouvelle chronique, jour après jour, qui ne viendra jamais. Il est possible que tu attendes une semaine, un mois, un trimestre. Puis tu te lasseras, et tu oublieras Rhum Raisin. Puis quand tu y repenseras, dans un flash mémoriel inconscient qui surviendra étonnamment lorsque tu apprendras, à la radio, la mort de Lara Fabian, en 2052, tu te diras sûrement Quel connard, au fait, ce Rhum Raisin, il n’a jamais dit au revoir, il n’a jamais laissé signe de vie. Et pour cause.

Je profite donc de ma mort qui aurait très bien pu se produire, déjà, dans ma jeune vie pour instaurer un code entre toi et moi, lecteur, lectrice. Si je suis vivant, que je n’écris rien pendant de longs jours et que je n’ai pas fait mes adieux publiquement, je m’engage à donner un signe de vie le jour de mon anniversaire. Evidemment, si ma dernière chronique date du premier février, il va falloir vivre dans le terrible doute pendant un an, en attendant patiemment le signe de vie qui te fera plaisir. (Bon, en vrai, il existe d’autres moyens pour connaître mon état de vie; me contacter, par exemple). Si rien n’est publié ce jour-là, tu pourras alors en déduire la sinistre vérité.