Comme Zouk Machine avait la musique dans la peau, j’ai toujours eu le jeu dans la peau.
Ka sa yé Misyé Bobo… A tel point que dans mon enfance malheureuse
où il fallait aller à la mine afin d’obtenir quelques pièces pour s’acheter du pain, j’ai envisagé parfois devenir animateur de jeux à la télévision. Je n’aurais bien sûr jamais eu le talent d’animation d’un Nagui ou d’un Lagaf’, mais je me serais contenté d’un talent à la Patrice Laffont. Il va de soi que j’aurais surpassé le talent (même si le terme est un peu excessif) d’un Cyril Féraud.
Enfant, et même adolescent, je n’ai pas compté la quantité pléthorique de parties de
Scrabble, de
Monopoly, de
Trivial Pursuit, de batailles, de dominos, de petit bac que j’ai pu jouer avec mes voisines, mes cousins, ma grand-mère et autres gens qui croisaient mon chemin. Évidemment, je gagnais souvent, parce que je suis fort. Je m’arrangeais parfois pour perdre, de manière à ce que jamais le moindre soupçon d’éventuelle triche ne s’éveille dans l’esprit de n’importe quel adversaire humilié d’avoir un jour rencontré mon jeu.
Mon plaisir de jouer à des jeux de sociétés comme
Super Défi,
Dix de Chute, Labyrinthe, Taboo Junior, Cluedo Junior ou encore
Eurêka s’est peu à peu transformé en désir de fabriquer moi-même des jeux et faire participer mes camarades de classe ou ma famille. Ce désir de devenir le Monsieur Loyal du jeu mijotait chaque été lorsque je passais deux mois à la campagne chez ma grand-mère, souvent installé devant la télévision, excité à chaque début de générique de programmes de jeu tels que (dans le désordre)
Pyramide, Intervilles, Mokshû Patamû, Les Bons Génies, Le Maillon Faible, Qui est qui ?, La Chanson Trésor, Que le meilleur gagne, 100% questions, Presse-Citron, Quelle galère !, Tout vu tout lu, L’Or à l’Appel, Jeux sans Frontières, Fa Si La Chanter, etc.
Voilà donc près de 20 ans que j’organise des jeux. Au début, c’était principalement des
Motus que je proposais à ma grand-mère, qui acceptait volontiers de deviner des mots de six lettres. Puis, mes petits cousins grandissant, j’organisais des chasses au trésor sophistiquées, mêlant énigmes, mots croisés et connaissance de la chanson française. Les bouts de papiers sur lesquels étaient inscrits les indices étaient dissimulés dans la maison et avaient été préalablement salis et brûlés autour pour les rendre anciens et précieux, comme les indices de
Fort Boyard. Le trésor se matérialisait la plupart du temps en « Bon gratuit » pour aller chercher un
Kinder Bueno ou
Délice caché dans le meuble de la salle à manger.
Lorsque j’étais en CM1, j’ai commencé une aventure incroyable. Tous les midis, après la cantine, j’organisais un grand jeu dans le fond du préau. Au début, deux camarades avaient accepté de jouer avec moi. Puis, au zénith de ma gloire d’animateur du jeu du midi dans la cour de récré, une dizaine de camarades participait quotidiennement. Le but était de retrouver le nom des élèves de la classe, dont j’avais mélangé les lettres. Parfois, je mélangeais aussi le nom des profs. Et quand le stock de noms était épuisé, je passais aux gens connus. Au fil du temps, le jeu du midi a évolué. J’y ai inséré des jeux de chansons, des jeux de statistiques, et même des jeux physiques. Le vendredi, j’avais même créé le jeu du « Serpent maléfique » dont la règle était tellement compliquée que je ne m’en rappelle plus trop aujourd’hui. Chaque jour, le vainqueur remportait un cadeau. Toute ma richesse en surprises de
Kinder Surprise et en cadeaux que je trouvais dans les paquets de Chocapic, Nesquik ou Frosties y est passée. Un vendredi, j’ai même fait gagner une carafe! Ma mère n'a jamais su comment cette carafe avait disparu. Mon jeu du midi a perduré jusqu’à la fin du mois de septembre de l’année de ma sixième. Les temps avaient changé.
Chaque été, j’avais beau être au collège, puis au lycée, ma fibre d’organisateur/animateur de jeux continuait avec mes cousins et ma famille. Mais mes amis, eux, trouvaient les jeux un peu ringards. Je n’osais donc pas leur proposer une soirée
Trivial Pursuit. Jusqu’à mon année de prépa. Anaïs avait invité cinq ou six filles de la classe, et moi, pour une soirée « Années 90 ». La tentation d’organiser un quiz géant sur nos années d’enfance était trop forte. J’ai posé plein de questions, parfois à choix multiples, pendant la soirée. Nous avons beaucoup ri et le ressenti post-soirée fut assez jouissif.
Depuis 2005, quelques soirées « jeux de société » ont été parsemées dans mon emploi du temps, mais trop peu à mon goût. Jusqu’au jour où une nouvelle passion est née :
N’oubliez pas les paroles ! Faisant fi des refus auxquels j’ai été confronté en me présentant à la sélection du jeu musical de France 2, j’ai décidé de reprendre ma casquette d’animateur de jeux en préparant des soirées
N’oubliez pas les paroles ! La mise en œuvre fait un peu amateur, mais le concept est respecté. Le choix des chansons est prenant. La préparation de la difficulté est agréable. L’invention des thèmes est jouissive. L’attente est interminable. Et quand arrive le jour J, je suis tout excité. Tendre des pièges est un plaisir qui n’a pas de prix. Jubiler lorsque quelqu’un choisit le thème « Avec une laisse » en croyant tomber sur
Mirza et n’a finalement le choix qu’entre
Laisse-moi t’aimer et
Laisse le destin l’emporter, c’est à vivre au moins une fois dans sa vie de concepteur de jeux.
Aujourd’hui, mes excitations à préparer des jeux et à me glisser dans la peau d’un animateur ne sont pas prêtes de s’éteindre. Il paraît qu’à la rentrée, une énorme soirée « Jeux télé » se profile… Je prépare un match en 5 manches :
Mot de Passe, Money Drop, N’oubliez pas les paroles !, Questions pour un champion et
La Cible. J’en frissonne d’impatience.
Photos chopées sur : jctvjeuxteles.kazeo.com, club.ados.fr, olivierminnezone.free.fr.