Le grand drame des actrices et des chanteuses ayant le plus gros de leur carrière derrière elles – cette introduction étant également valable pour la gent masculine – est probablement le fait qu’elles ne sont, pour la jeune génération, rien de plus que l’image que reflète leur image actuelle. Pour les enfants de l’an 2000, ceux de l’an 1990, voire ceux de l’an 1980 – oserai-je même remonter aux enfant de l’an 1970 –, Jeanne Moreau n’est rien d’autre qu’une vieille dame à la voix moche, Danièle Gilbert n’est rien d’autre qu’une vieille femme s’étant illustrée dans La Ferme Célébrités et Jane Fonda n’est rien d’autre qu’un vieux mannequin pour crème liftante. Nicole Croisille, quant à elle, n’est rien d’autre (si tant est que son nom évoque quelque souvenir à la jeune génération) qu’une vieille chanteuse qui vient dans les émissions de Michel Drucker et qui joue les vieilles mégères dans les feuilletons de l’été de TF1.
Déjà plus de quarante ans de carrière au compteur de Nicole Croisille. Et pourtant, le constat que l’on peut faire en cet automne 2008, c’est que Nicole n’a jamais véritablement pu compter sur un capital sympathie comme celui qu’ont toujours eu certaines de ses contemporaines. Nicoletta ou Mireille Mathieu, en plus d’être plus connues de la jeune génération que l’est Nicole Croisille, ont eu davantage d’admirateurs que Nicole Croisille. Peut-être est-ce dû à sa froideur apparente, à son rouge à lèvres toujours très pimpant ou à sa technique vocale quasi-parfaite. Et paradoxalement, Nicole a collectionné bon nombre de tubes bien ancrés dans l’inconscient collectif des téléspectateurs de Télé Mélody.
Il y a d’abord eu la bande originale du film de Claude Lelouch, Un homme et une femme, avec des Ouabadabada Ouabadabada hyper stressants et au final assez peu agréables. Puis elle a chanté la chanson issue du film Les jeunes loups, I’ll never leave you, qui ne resta pas dans les mémoires, et ça se comprend. Le plus gros tube de Nicole Croisille est, à mon sens, Une femme avec toi. Elle parle du plaisir de se sentir femme, face à un homme qui l’estime assez, qui l’aime assez pour lui faire ressentir la joie de vivre l’amour avec lui. La principale caractéristique de cette chanson est cette note suraiguë qu’elle parvient (parvenait) à sortir, montrant, il faut bien l’avouer, sa grande technique vocale. Viennent également les titres Emma (Je m'appelle Emma), Les uns et les autres, la reprise du Blues du businessman, et la chanson des Cœurs brûlés.
Mais si je dois retenir trois chansons du répertoire de Nicole Croisille, je donne sans aucune hésitation ces trois-là :
- Parlez-moi de lui : tout simplement parce que cette chanson m’a toujours fait peur. Probablement à cause de ces chœurs mi masculins mi fantomatiques qui rabâchent que cet homme, dont Nicole est éprise, leur parle d’elle. Bien sûr, quand on ne sait rien de l’autre, on cherche à savoir, par des moyens parfois douteux, comment cet autre se porte. Mais dans cette chanson, l’ambiance n’est pas saine. Il y a ces chœurs entre lui et elle qui demeurent assez intrigants.
- Téléphone-moi : tout simplement parce que je trouve le titre très original pour une chanson de 1976. Et aussi parce que la détresse des paroles de la chanson m’émeuvent assez pour en apprécier la mélodie.
- J’ai besoin de toi, j’ai besoin de lui : tout simplement grâce au tempo un peu désuet mais qui a fait la force des années soixante-dix. Peut-être aussi par le thème de la chanson qui m’a toujours fasciné.
Cher lecteur, chère lectrice, je te propose donc d’écouter J’ai besoin de toi, j’ai besoin de lui, pour te rappeler que moi aussi, j’ai besoin de toi.
[Précédemment dans Ils ont marqué la chanson française : François Feldman, Ophélie Winter, Claude Nougaro, Bill Baxter]
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