Aujourd’hui, c’était la rentrée. Et pourtant, c’est la première fois que je ne fais pas la rentrée. Mais oui, mais oui, l’école est finie. Je ne vivrai plus ces insupportables nuits à la veille d’une rentrée scolaire. Adieu les centaines de retournements dans le lit pour cause de non-endormissement, adieu les dizaines de chansons chantées dans la tête pour tenter de trouver le sommeil, adieu les pensées inexpliquées alors que l’heure de la nuit avance et qu’il ne reste déjà plus que cinq heures avant que le réveil sonne. Évidemment, cela pourra très bien se produire à nouveau, mais pas pour une rentrée scolaire. Et heureusement, en fait, parce que les rentrées scolaires, elles n’ont pas toujours été
Nelson mon fort.
Petite section de maternelle – Je n’en ai absolument aucun souvenir. Je sais seulement que j’étais à l’école de l’O., à C. Je soupçonne même Maman de m’y avoir inscrit en cours d’année, uniquement dans le but que je ne me souvienne pas de ma première rentrée scolaire.
Moyenne section de maternelle – Aucun souvenir non plus, à part peut-être le fait que c’était la dernière rentrée scolaire à l’O., vu que l’école allait être détruite.
Grande section de maternelle – Je crois que c’est là qu’apparaît mon tout premier souvenir de rentrée scolaire. Un souvenir vague. Je débarquais dans une nouvelle école. Une nouvelle classe. Des nouveaux camarades. Et une nouvelle maîtresse. Il faisait beau. La salle de classe donnait sur la cour de récré et la porte était ouverte. En guise de bienvenue, alors que tous les autres élèves se connaissaient déjà depuis la petite section, la maîtresse m’a demandé de venir lui faire un bisou sur la joue. Ce que j’ai fait devant tout le monde. Comme si c’était le sésame pour me faire accepter de tout le monde. Une soirée d’intégration en quelque sorte, mais version soft.
CP – Étonnamment, je n’ai pas vraiment de souvenir de cette rentrée-là, à l’école F. Maîtresse M., qu’on appelait Ginette, a probablement fait l’appel avant de nous demander d’apporter, le lendemain, un gobelet chacun, afin de pouvoir se désaltérer après chaque récréation.
CE1 – Je savais pertinemment que Madame B. était très différente de Maîtresse M. Elle avait une grosse voix, elle était plus jeune, plus dynamique. On se connaissait tous depuis le CP. C’est là que j’ai pu mesurer mon sensible succès auprès de mes camarades. Trois voulaient impérativement s’asseoir à côté de moi. J’ai choisi Jennifer B.
CE2 – Avant même la rentrée, je n’aimais pas Monsieur M. Il allait être mon premier maître, alors que j’étais habitué à des maîtresses. J’étais assez excité car on entrait chez les grands. En effet, la classe des CE2 était au deuxième étage, le même que pour les CM1 et les CM2.
CM1 – Cette année-là,
je chantais pour la première fois c’est moi qui avais envie de m’asseoir à côté de quelqu’un. Mais ma timidité maladive m’empêcha de le lui avouer. De toute façon, Monsieur P. avait déjà établi le plan de classe. J’étais au troisième rang, dans la rangée du milieu, à côté de Lassad N.
CM2 – Cette rentrée fut l’une des pires de ma vie. Il y avait deux classes de CM2. Celle de Monsieur J. et celle de Madame P. en alternance avec le Frère F. Je voulais absolument être dans cette deuxième classe, parce que Madame P. avait la réputation d’être sérieuse et de bien faire travailler (oui, moi je voulais travailler à l’école). Manque de bol, ce connard de directeur qui a toujours été jaloux de ma réussite, je le sais, m’a casé avec les cancres, dans la classe de Monsieur J. J’ai pleuré tant que j’ai pu, le midi, auprès de Maman, pour qu’elle fasse quelque chose pour me sortir de ce cauchemar qui allait durer un an. On m’a dit que je devais rester au moins un mois dans cette classe. Si vraiment je ne m’y habituais pas, j’irais dans l’autre classe. Monsieur J., dont c’était la dernière année avant la retraite, a été d’une pédagogie exceptionnelle et d’un humour très fin. Je suis resté dans sa classe. Finalement, mon année de CM2, passée entièrement à côté d’Alexandre R. a été la meilleure de toutes jusqu’au bac.
6e A – Il fallait marquer le coup. J’avais donc choisi mes vêtements en conséquence. Je prie encore aujourd’hui pour que personne n’aie jamais pris, ce jour-là, une seule photo. J’ai tellement honte, rétrospectivement, de ma rentrée en 6
e. Toutes les classes de 6
e attendaient dans la cour à l’appel des différentes listes. La 6
e européenne a été appelée en dernier, et étant dans la fin de la liste, je suis resté presque tout seul dans la cour, Maman avec moi, à attendre mon tour. Tout le monde a donc pu admirer longuement mon polo blanc, mon bermuda rouge et mes chaussettes sous les sandalettes.
5e B – Rien de bien spécial pour cette rentrée sauf que j’ai toujours détesté que la classe européenne ne soit plus la A mais la B désormais.
4e B – J’étais un peu amoureux, depuis la 5
e. Et comme nous étions toujours les mêmes dans la classe européenne, nous nous retrouvions avec plus ou moins de plaisir à chaque rentrée. Maintenant, je m’habillais normalement.
3e B – Ce jour-là, on nous a précautionneusement rappelé que nous commencions l’année du brevet. J’avoue ne pas avoir eu un seul soupçon de crainte quant à ma réussite anticipée de cet examen, reposant en grande partie sur le contrôle continu. Le futur me confortera dans cette absence de crainte.
2nde B3 – J’ai toujours rêvé d’être en 2B3 à l’époque des 2 Be 3. Malheureusement, cette classe arriva quatre ans trop tard. Mes goûts décalés pour les vêtements refirent surface à cette rentrée. J’avais un t-shirt informe et un pantalon ocre affreux qui remontait très haut au-dessus du bassin. Je n’étais pas très heureux à la rentrée de seconde. Je n’étais pas très bien dans ma peau. Cette sensation m’a poursuivi toute l’année, année qui fut la pire de mon cursus.
1ère S2 – Je retrouvais avec plaisir mon prof de physique de la seconde, Monsieur D., devenu prof principal de la 1
ère. Je venais de terminer une année difficile. Ma 1
ère m’a un peu fait relativiser, mais j’ai pris conscience d’une chose : mes années lycée resteront un mauvais souvenir.
TS2 – Nous étions 17 dans la classe. Ce n’est pas que mes camarades étaient méchants ou pas sympathiques. C’est juste que je n’avais pas envie de leur parler. Troisième rentrée tristounette consécutive.
Prépa – Petite excitation ce jour-là. Changement de locaux et refonte totale du catalogue de visages de la classe. Pour la première fois depuis la grande section de maternelle, je ne connaissais personne. Une petite pièce de vie était aménagée juste à côté de la salle de classe. Nous avons bu du jus d’orange. J’ai fait la connaissance d’Anthony et de Robin. (Je suis même allé chez Anthony le soir même). Puis j’ai discuté avec Jessica, Pauline, Anaïs, Martin et les autres. Enfin, je trouvais des gens qui s’intéressaient un peu à moi. C’est là aussi que j’ai appris que le voyage d’intégration allait se faire au Portugal. J’étais ravi de découvrir l’inconnu. Cette euphorie dura jusqu’au mois de janvier. L’ambiance a un peu changé par la suite, mais mon année de prépa reste incontestablement la meilleure année de ma scolarité, tous niveaux confondus et tous domaines confondus.
LLCE2 Anglais – Ma première journée à la fac fut assez nulle, comme j’avais pu l’imaginer. Au lieu de commencer les cours le jour de la rentrée, nous avons eu droit à une réunion mal organisée qui a duré 20 minutes à tout casser. L’amphi était surchargé. J’étais triste d’être là. Je reconnaissais des visages mais je n’avais pas envie d’aborder leurs propriétaires. Heureusement, j’ai aperçu Céline. Je suis allé la voir. Elle a été ma camarade pendant les deux années de fac. Tant mieux.
LLCE3 Anglais – J’étais en compagnie de Céline. Nous avons choisi nos cours et nos options. L’option « Chanson française au XX
e siècle » demeure à ce jour le cours le plus intéressant et plaisant que j’ai suivi.
J1 – Je débarque dans cette ville que ne connais presque pas, L. Cette école, dont je ne sais que ce qu’on veut bien me montrer, m’intrigue un peu. Est-elle bonne ? Est-elle fiable ? Est-elle sérieuse ? L’accueil est en tout cas à la hauteur de mes espérances. Un buffet charcuterie, fromage, légumes, fruits, boissons et desserts nous attend. On ne lésine pas sur le bling-bling dans cette école. Pour ce qui est du matériel de travail, on lésine un peu plus, mais ça, bien sûr, je ne le découvrirai qu’au cours des trois ans qui m’attendent. Je rencontre des gens nouveaux. Des gens qui obtiennent spontanément ma sympathie, et d’autres qui ont l’air con. Peut-être avais-je l’air con pour certains, moi aussi, avec mes cheveux de cinq millimètres.
J2 – Le buffet de l’an passé a laissé place à un petit-déjeuner un peu moins copieux. Quatre nouveaux élèves rejoignent la promo. C’est assez bon enfant, puisque j’aime assez ces études-là. Je discute avec l’un des quatre nouveaux. Son front brille comme un phare dans la nuit. Il est gentil.
J3 – Je n’imaginais pas qu’à la fin de cette année-là, j’allais réaliser une superbe chanson. J’en suis très fier. Cette rentrée a été moins forte que les deux précédentes. C’était la dernière. L'ultime rentrée avant la vie active. Vie active qui, aujourd’hui, n’est pas encore bien définie.