28 févr. 2008

Le rap mélodieux

C'est l'un des duos les plus étonnants du moment. Non, je ne parle pas de Nâdiya poussant la chansonnette avec Enrique Iglesias, mais du british lover James Blunt en compagnie du rappeur Sinik. On aurait pu s'attendre à une chanson ovniesque (ou ovnique, c'est comme vous voulez), et pourtant, les deux interprètes n'ont pas réussi à créer une chanson originale.
Leurs deux univers ne se mêlent pas ; ils se succèdent. Le couplet est rappé (comme les carottes) par Sinik, alors que le refrain est fredonné plaintivement par l'excellent James Blunt, toujours aussi désespéré. Cette chanson est destinée à être un succès, bien que le rap ne fasse pas fureur auprès de tout le monde. Ce n'est pas la tasse de thé de la ménagère de moins de cinquante ans, ni celle de son amant, et encore moins celle de sa mère. Je dois avouer que ce n'est pas non plus la mienne. Et pourtant, Je réalise est le cocktail idéal pour être un des tubes du printemps. Voici le clip, et on en reparle après.

Même les plus récalcitrants d'entre nous ne peuvent pas nier qu'un effort est fait pour rassembler un grand public. En effet, ce n'est pas que du rap. Dans l'histoire de la chanson française, la recette, c'est d'imaginer un refrain mélodieux qui dénote du couplet. Un p'tit air tout bête, qui trotte dans la tête. Et là, c'est le jackpot assuré. Ces soirées-là, on drague, on branche, toi-même tu sais pourquoi... Garçon, si t'enlèves la cédille, ça fait garcon, et gare aux cons ma fille, gare aux cons, gare aux cons, gare aux cons qui perdent leur cédille, dididoum dididam...
En fait, si un rappeur ne veut pas être condamné à ne squatter que les ondes de Skyrock, il lui faut innover et faire un refrain presque variétoche. Mon papa à moi est un gangster, mon papa à moi est un gangster, il fait partie du Ministère A.M.E.R. Que serait devenu le 113 sans le mythique gimmick lé lé la de Tonton du bled ou la voix féminine d'Au summum ? La Jeune demoiselle qui cherchait un mec mortel aurait-elle eu autant de succès sans son refrain aguicheur ? Vous rendez-vous compte que sans ces bons refrains, nous n'aurions eu droit ni à La tribu de Dana, ni à Fous ta cagoule ?
C'est simple, le rappeur (ou la rappeuse) a deux façons de faire de sa chanson rappée un tube avec un refrain mélodieux. La première est d'engager une voix féminine. Lève les bras et danse avec moi (en jean, en short, ou en djellabah, comme on le dit là-bas, bébé inch'allah)... J'ai paaaas le temps, mon espriiiit glisse ailleeeeurs... La deuxième méthode est d'accepter qu'un interprète d'un autre style s'incruste sur le titre. Face à la mer j'aurais dû grandir, face contre terre, j'aurais pu mourir... Comme ça, vous m'avez trahi, comme ça, hakada dertouha blya hakda hakda l'aabtouh blya hakda (comme ça)...
L'histoire de la musique nous le prouve : outre deux ou trois exceptions, les ventes de rap explosent bien souvent grâce à autre chose que du rap. En tout cas, en 2008, c'est James Blunt qui s'y colle pour accompagner l'homme Sinik.

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