19 janv. 2007

Et c'est le temps qui court

Est-ce que ça vous intéresserait que je parle de ma vie? Voulez-vous que je raconte de quoi sont faites mes journées actuellement? Avec qui je les passe? Dans quel objectif?

Quel étourdi je suis! Vous ne pouvez pas me le dire, puisque je suis justement en train d’écrire la chronique que vous êtes en train de lire, et que j’aurai donc publiée avant que vous puissiez répondre à mes questions. Je suis contraint d’imaginer arbitrairement une réponse qui pourrait être la vôtre. Je considère donc que ceci ne vous intéresse pas, et vous soumets alors une chronique sur un autre sujet.

Les jours s’écoulent inlassablement, et celui qui me fera passer à ce chiffre impair divisible par 3, et par 7, arrive à grands pas. Si l’on en croit les statistiques récentes sur la démographie en France, il est fort probable que j’ai déjà vécu plus d’un quart de ma vie. C’est quand même beaucoup, un quart. Si ma vie était une chanson, j’aurais déjà entendu un couplet et un refrain en entier. Ce qui est affolant, c’est d’être un homme, et d’avoir 77 ans en 2007, ou bien d’être une femme, et d’avoir 84 ans en 2007. En effet, si ces gens sont des gens normaux, et, en plus, si ce sont des français moyens, ils ont alors statistiquement toutes les chances d’avoir Jacques Chirac comme dernier président de leur vie. Je compte sur le fait que lorsque j’aurai 77 ans, l’espérance de vie masculine ait grimpé jusqu’à 95 ans. En conjecturant cela, je peux dire que j’ai à peine dépassé les deux neuvièmes de ma vie, ce qui est plus rassurant que d’avoir déjà dépassé le quart de ma vie. Il est tout à fait légitime de se dire que ces calculs sont futiles, puisque je peux très bien aussi avoir déjà vécu les treize quatorzièmes de ma vie, ce que je ne me souhaite pas, et ce que je ne souhaite pas aux statisticiens, qui verraient alors, à cause de moi, le taux de mortalité augmenter, et l’espérance de vie masculine baisser, faisant alors mentir les tendances de 2007.

Le grand paradoxe de la plupart des gens est la peur de mourir et la peur de vieillir. Ce n’est pas logique. Alors en général, l’homme – au sens large du terme – choisit malgré lui la solution de vieillir; si on vieillit, on est sûr de mourir, mais plus tard, alors que si on meurt, on est sûr de ne plus vieillir. Vieillir est donc la solution idéale pour permettre de repousser la mort. Cette lapalissade me fait rebondir sur le fait que ce sont les japonais qui vivent le plus longtemps. L’un de leurs secrets est le concombre vivifiant, riche en vitamine C. Ce concombre permet de se maintenir en forme, même si on est très vieux. Par exemple, Kozo Haraguchi court le 100 mètres en 21,69 secondes. C’est pas mal quand on sait que cette sportive a 95 ans. Evidemment, ce genre de choses plombe le moral quand on n’aime pas le concombre. Mais vieillir, c’est bien aussi: on peut demander aux autres de faire des travaux pénibles, on peut regarder Des chiffres et des lettres sans se dire que ce n’est pas de son âge, on peut être fier tous les jours de connaître les gens dont le nom est dans le journal, à la page nécrologie. Sincèrement, il y a des avantages d’être vieux. Quand on a fondé une famille, on est heureux de voir ce que sont devenus ses enfants, et de voir ce que deviennent ses petits-enfants. Et puis les seniors sont maintenant des gens de moins en moins oubliés par la société. C’est normal, puisque les plus de soixante-cinq ans représentent environ 15% de la population. Et ils sont en forme! Mais être vieux et en forme n’est pas une évidence. On ne sait pas ce que nous réserve notre fin de vie. Même si manger des mets à base d’huile d’olive, mettre de la crème réparatrice sur le visage, dormir beaucoup, boire son urine, ou faire de l’exercice au quotidien, permettent de garder la forme, nul n’est à l’abri d’être un jour vieux, grabataire, et rabat-joie.

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