29 mars 2007

À bon entendeur

Ça faisait deux ans que j’avais arrêté. Et j’ai recommencé. Bien sûr, ça ne m’est pas tombé dessus par hasard. Je l’ai cherché, parce que ça me manquait. A partir de la classe de première, c’était chaque soir. Au début, je tâtonnais. Puis peu à peu, je prenais mes marques. Et le plaisir grandissait au fur et à mesure de mes soirées. Ça me plaisait, et plus ça me plaisait, plus je continuais. Evidemment, je faisais ça tout seul, mais quand j’y ai goûté, j’ai eu du mal à arrêter, malgré la solitude bien présente avec moi. Alors je continuais, inlassablement, mon excitation se développait. Et j’aimais ça.

J’étais devant mon ordinateur, et je découvrais MSN. On me disait au lycée: Vas-y, télécharge MSN, c’est marrant. Alors, j’ai téléchargé MSN. Et ce fut le début d’une addiction qui m’a perturbé plus qu’autre chose. Je discutais avec des personnes que je connaissais, et curieusement, nous nous échangions des mots que nous ne nous serions jamais dit les yeux dans les yeux. Parce qu’écrire, c’est plus facile. Je me familiarisais avec ce nouvel élément de ma vie qui allait prendre de plus en plus de place. De plus en plus de personnes me donnaient leur adresse MSN. Ce qui était drôle, c’est que je me retrouvais avec des contacts MSN avec qui je parlais davantage que dans la vraie vie. Et puis je jouais aussi. Au démineur, parce que c’était mon jeu préféré, et le jeu préféré de l’un de mes contacts. Alors nous jouions tous les deux, même le 24 décembre alors que j’étais en retard pour me préparer. Quand je rentrais à la maison, je me précipitais sur l’ordinateur pour voir qui était connecté au même moment que moi, qui faisait comme moi en quelque sorte. Et petit à petit, les limites d’heure que je me fixais se décalaient malgré moi, jusqu’à ce que la nuit ne me fasse même plus peur. Lorsque j’étais écolier, puis collégien, 21h00, 22h00, puis 23h00, c’était tard. Avec MSN, je ne me rendais même plus compte que 1h00, 2h00, puis 3h00 du matin, c’était vraiment trop tard pour un jour de semaine. Et c’est là que mes cernes indélébiles se sont formés. Ils font partie de mon indiscutable charme, mais tout de même.

Puis un jour, j’ai réalisé que je passais beaucoup trop de temps sur MSN. Je n’étais pas un fou d’Internet, ni de jeux sur ordinateur, mais MSN, ça, si, parce que discuter avec les gens, j’aime. Enfin je suis peut-être plus souvent une oreille attentive (ou des yeux attentifs), qu’une bouche bavarde (ou des doigts bavards), mais je trouvais mon plaisir dans ma solitude relative, face à mon écran, et à mes compatriotes virtuels. MSN devenait une drogue.

Jusqu’au jour où l’ordinateur à lâché. Plus de MSN. Plus rien. Mais à l’arrivée du nouvel ordinateur, l’envie de réinstaller MSN avait réoccupé tout mon cerveau. Je m’ennuyais au début, puis je me suis habitué et les quelques jours sans ordinateur m’avaient finalement fait recouvrer la raison. Et j’ai dit Stop. C’est ainsi que je suis revenu à la vie civilisée, sans MSN. Mon esprit retrouvait sa sérénité, mes résultats scolaires se rapprochaient à nouveau des sommets d’auparavant, ma vie était plus saine. Un an et demi après, un désir ardent me poussa à réessayer MSN. Je me disais qu’il fallait que je m’oblige à ne pas rester trop longtemps devant l’écran, et à ne pas me connecter trop souvent. Entre-temps, MSN était devenu Windows Live Messenger. Le grand public appelle encore WLM MSN, et c’est dommage, puisque WLM est plus joli que MSN. J’ai encore laissé passer quelques temps. Puis, par un joli soir d’ennui, en janvier dernier, j’ai téléchargé WLM. C’était le bonheur. Comme si je dégustais un Kinder® après des années de non dégustation de Kinder®.

C’est ainsi qu’après deux années de solitude noire lors de longues soirées d’hiver, de printemps, d’été, et d’automne, j’ai retrouvé la saveur de la solitude un peu moins noire, celle que l’on pratique avec d’autres âmes solitaires, virtuellement. Et depuis un peu plus de deux mois, ma vie ne me semble pas moins équilibrée qu’avant. L’important pour moi est de ne pas tomber dans l’écueil de se connecter machinalement à WLM dès que j’arrive sur Internet. Je me suis fixé des règles strictes; je ne veux plus passer une quantité pléthorique d’heures à discuter avec des interlocuteurs ou trices, aussi intéressants, gentils, et attirants soient-ils. Il faut trouver le juste milieu, et ce n’est que comme ça que je peux apprécier pleinement WLM.

Voilà, il ne me reste plus qu’à vous donner mon adresse WLM, si vous désirez parler au vrai Rhum Raisin: rh… Euh…





(Vous n’imaginiez tout de même pas que… Non?…)

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